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La porte à gauche. Jean FERRAT a chanté que certains prétendent que le bonheur était à la porte à droite. Aujourd’hui est-il à la porte à gauche ? Oui ! mais à la condition de secouer le cocotier de la pensée convenu ! Ce petit blog crée à l’initiative de quelques militants communistes de Vierzon n’a d’autres ambitions que de donner aux citoyens un support pour s’exprimer librement sur les sujets politiques, sociaux ou culturels d’actualité du local à l’international, qui s’émancipe des discours convenus, des lignes officielles décidées par quelques notables de la politique, aux doubles langages, aux bonimenteurs de vraies fausses solutions et qui cultivent la résignation. Déverrouillez les débats et enfoncez la porte à droite (….ou à gauche ?) Les seules limites, car il en faut, à notre liberté : Celle du respect des personnes, le souci de la vérité et de faire vivre le débat. Ainsi seront exclus tous messages comprenant des insultes ou diffamations visant une (des) personne(s), seront exclues, s’ils sont avérées, des informations mensongères ou rumeur infondées. Chacun pourra également participer au débat juste et loyal en signalant un abus de cette nature. Les productions de ces abus seront retirés et l’auteur exclu du blog.

«Le gouvernement joue un jeu de dupes»

La dernière fois que la CGT s'est rassemblée, c'était pour mettre fin à la douloureuse séquence Thierry Lepaon, en février 2015. Philippe Martinez, son remplaçant, passé de justesse à la tête d'une organisation en crise, s'est finalement plutôt bien installé dans le fauteuil, au point de devenir incontournable dans le paysage social. Le contexte pour l'organisation est porteur : la CGT reste unie dans sa stratégie contre la loi sur le travail et occupe une grande partie des rangs des cortèges syndicaux depuis plusieurs semaines. Elle montre cependant ses faiblesses et ses limites lorsqu'il s'agit de réagir vite à des mouvements venus de la base, du dehors, telle la pétition en ligne, initiée par Caroline De Haas, contre le projet de loi sur le travail ou encore les Nuits debout, rassemblements citoyens qui fleurissent en France, au-delà des appareils traditionnels. Le renouvellement du bureau confédéral, au programme de ce 51e congrès organisé jusqu'au 22 avril à Marseille, portera, ou pas, la marque d'une plus grande ouverture, aux femmes, aux jeunes et à une autre manière de faire du syndicalisme. Entretien avec Philippe Martinez.

Quelle relation la CGT entretient-elle avec le mouvement « Nuit Debout » ? Certains sur ces places ont une lecture très dure et radicale du système actuel dans lequel ils englobent les syndicats. Comprenez-vous cette critique ?

Philippe Martinez : Comme vous l’avez dit, certains critiquent le système, et plus que le système, le manque de démocratie. Et oui, là-dedans il y en a encore certains qui nous mettent dans le même sac. C’est vrai pour partie à Paris mais, comme nous le rapportent des militants de la CGT qui sont nombreux à participer à la Nuit debout, ce n’est pas vrai partout. Il y a plus de 80 rassemblements en France et les camarades me disent qu’ils sont plutôt bien accueillis dans la quasi-totalité de ces rassemblements. Mais il y a des comparaisons qui ne semblent pas tout à fait justifiées, principalement avec l’Espagne et la Grèce.

La différence, c’est que ce mouvement « Nuit Debout » est né en France dans un contexte de mobilisation sociale. Les Syriza, c’était le calme plat sur le plan social, tout comme en Espagne, où il y avait, à l’époque, un consensus politique et syndical sur la nécessité de faire des réformes du même acabit que ce que l’on nous propose aujourd’hui en France. Donc, la nuance est de taille. La première Nuit debout a eu lieu le soir du 31 mars, journée de mobilisation. Donc oui, nous voyons ça d’un très bon œil, que des citoyens expriment le besoin de démocratie et réfléchissent, dans un monde qui ne va pas dans le bon sens, à quelle alternative politique possible.

Plus de démocratie, c’est ce que l’on réclame dans les entreprises. Ce serait très difficile de faire des Nuits debout ou des Journées assises dans les boîtes puisque le patronat considère que l’entreprise est un lieu de non-citoyenneté. On rentre dans l’entreprise, on laisse ses idées à la porte et on ne les récupère qu’à la sortie. Donc nous nous battons pour que la citoyenneté et la démocratie puissent fonctionner aussi dans cette enceinte. Notre contribution est là, à travers le prisme du syndicalisme. Quand nous proposons de travailler moins (et c’est l’un des sujets évoqués aux Nuits debout), eh bien, nous proposons des alternatives sociales dans notre société.

Philippe Martinez, Montreuil, le 14 avril 2016. © Rachida El Azzouzi Philippe Martinez, Montreuil, le 14 avril 2016. © Rachida El Azzouzi

 

Certains syndicats, comme Solidaires, vont plus loin dans leur implication et sont sur la place, physiquement, et d’ailleurs plutôt bien reçus… Vous pourriez aller sur la place de la République ?

Oui, je pourrais y aller, même si la période était compliquée jusque-là en termes d’emploi du temps. Mais je le répète, des tas de militants CGT, à Paris ou ailleurs, sont physiquement présents. Nous respectons aussi le souci de ceux qui organisent que personne ne mette la main sur le mouvement.

Nous avons entendu, ici ou là, des militants qui disent qu’ils ne sont pas là pour « occuper des places »… Est-ce qu’il n’est pas temps, au contraire, de repenser le mode d’action syndicale ?

Ce qui se passe aujourd’hui est complémentaire. Mais notre principale forme d’action et d’intervention doit toujours porter sur le monde du travail.

Oui, mais est-ce encore efficace, vu le peu de victoires accumulées ces dernières années et la faible syndicalisation ?

Alors oui, peut-être qu’on s’y prend mal… Mais où sont les salariés, les précaires ou ceux qui voudraient avoir du boulot ? Sur les lieux de travail.

Cela rejoint une question qui vous a déjà été posée par Mediapart : comment aller chercher, avec cette méthode, ceux qui vous manquent, à savoir les précaires, les plus jeunes, par corrélation, et les chômeurs, de plus en plus nombreux ?

Les précaires sont eux aussi dans l’entreprise. Il n’y a que les privés d’emploi qui n’y sont pas. 

Manifestation contre la loi sur le travail à Paris, le 17 mars 2016. © Rachida El Azzouzi Manifestation contre la loi sur le travail à Paris, le 17 mars 2016. © Rachida El Azzouzi

 

Oui, mais les précaires ne sont pas toujours, par leur statut, en capacité de se syndiquer, ni même dans une situation d’être rejoints par le mouvement syndical ?

Non, ce n'est pas compliqué de les attraper, il faut simplement avoir la volonté de discuter avec eux.

Sauf que ça ne marche toujours pas très bien ?

Nous avons la volonté, peut-être faut-il faire beaucoup plus d’efforts… Mais je n’ai pas changé d’avis. Par exemple, j’étais à Disney ce matin [jeudi 14 avril – ndlr]. C’est typiquement une entreprise où il y a toutes les formes de salariat possible. Nous étions devant le McDonald's qui rapporte le plus d’argent en Europe, au centre de Disney Village, près des restaurants, des hôtels. Disney, c’est 15 000 salariés, 5 000 précaires, des statuts hétéroclites, 42 nationalités différentes, des temps pleins, des temps partiels… C’est un endroit qui symbolise le mieux la diversité de l’emploi, même s’il n’y a pas d’industrie. Donc, on ne peut pas avoir un seul langage pour cette diversité de salariés et c'est là-dessus que nous agissons.

L’exemple de Disney est un bon exemple, l’action syndicale y est très difficile et le syndicalisme a donc toutes les peines du monde à être efficace. Donc comment fait-on ? Est-ce que l’entreprise (ou la fonction publique) est le seul lieu de déploiement du syndicalisme ?

C’est la bonne façon de faire parce que c’est là où sont les salariés, mais évidemment, ce n’est pas exclusif. Pour tous ceux qui sont victimes de répression ou qui, pour des raisons objectives, ne veulent pas ou ne peuvent pas s’afficher syndiqués, eh bien, on peut aller le soir discuter dans des endroits éloignés de la pression patronale. Donc oui, toutes les formes d’expression de la démocratie sont importantes. Mais il ne faut pas négliger l’entreprise : c’est le lieu de la contradiction, le lieu où l’on crée des richesses, là où certains gagnent très peu et d’autres beaucoup, là où l’on cache son argent dans des endroits désormais célèbres de la planète.

Vous croyez donc à une possible liaison entre la « Nuit Debout », que certains qualifient de « République des bobos blancs », et le monde du travail ? 

Il le faut. À condition que tout le monde respecte la diversité des opinions et des situations. Ce sont des débats qu’on a avec les jeunes, les étudiants : on peut crier « grève générale ». Moi je suis pour. Mais il y a une différence entre des lycéens qui crient « grève générale », et des salariés qui, quand ils font grève, en payent le prix sur leur salaire.

Dans cette même veine, la naissance de la mobilisation contre la réforme du code du travail a démarré grâce à une pétition très virale, pédagogique, relayée par des habitués des réseaux… Est-ce qu’elle a si bien fonctionné parce que vous, les syndicats, n’y étiez pas, formellement ? Et regrettez-vous que ce ne soit pas des syndicats qui aient été à l'initiative ? Sur votre « cœur de métier » qu’est le travail ? 

Nous travaillions depuis des mois à construire une mobilisation. La CGT a discuté d’une proposition de grève interprofessionnelle dès le mois de novembre, pour la seconde quinzaine de mars, avec la volonté de ne pas y aller tout seuls. Donc, c’était dans le paysage. Mais c’est vrai, il y a, là aussi, un mouvement citoyen, plus large, moins étiqueté syndicaliste peut-être, dont la principale initiatrice est Caroline De Haas, qui lance une pétition. Mais la pétition en ligne, c’est un truc qu’on connaît bien à la CGT, on en a quelques-unes sur notre site, c’est une forme d’action qui nous est familière. Et là aussi, c’est complémentaire, beaucoup chez nous ont signé et cela a contribué à nourrir le climat que l’on connaît depuis deux mois.

Par Rachida El Azzouzi et Mathilde Goanec

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