17 Septembre 2014
Le Front de gauche n’est pas mort, mais il ne bouge pas encore. Ce samedi, dans la salle des fêtes de la mairie de Montreuil, environ 200 responsables nationaux et cadres locaux, encartés et non-encartés, se sont reparlé. Toute la journée, à huis clos, sauf pour la dernière heure et demie, les interventions de trois minutes ont dégagé un consensus autour du rejet franc et massif du gouvernement Valls, mais rien de plus. Tout juste a-t-il été décidé une réunion du même type courant novembre, et énoncé une volonté de relancer d'ici là les assemblées citoyennes. Avec le sentiment, vu le peu d’enthousiasme ambiant, qu’il s’agissait là de formules de politesse, davantage que de réelle dynamique.
« En juillet, le Front de gauche était proche de la mort, mais ce n’est plus le cas, tout le monde était présent et s’est reparlé, philosophe l’eurodéputée Marie-Christine Vergiat. Il faut déjà se satisfaire de cela, et se dire que c’est une première étape. » De cette journée, à laquelle ont assisté côte à côte Pierre Laurent et Jean-Luc Mélenchon, on ne retiendra toutefois qu’une « déclaration » commune, somme toute assez convenue, évoquant des participations à d’éventuelles manifestations syndicales à venir, des « initiatives » à prendre, mais sans dire lesquelles, la VIe République comme « moyen essentiel de sortie de crise », ou un appel à « ne pas voter la confiance » à Manuel Valls.
Pour autant, impossible de dire de quoi demain sera fait au Front de gauche, chacun parmi les diverses composantes du rassemblement de la gauche radicale semblant rester dans son couloir stratégique, et personne n’ayant visiblement envie de se confronter sur ses différends, faute de pouvoir réellement les trancher.
« On a encore du travail à faire sur notre projet par rapport à l’incroyable glissement d’un gouvernement qui n’a plus rien de social et qui est désormais strictement néo-libéral, explique le dirigeant communiste Francis Parny. Le rassemblement de la gauche que nous appelons de nos vœux ne peut plus prendre la même forme qu’il y a dix ou quinze ans… » Pour le secrétaire national du PCF, Pierre Laurent, si « le diagnostic fait consensus : il n’y a aucun avenir avec le gouvernement Valls », il reste au Front de gauche à trancher l’éternel débat « sur la construction d’un rassemblement alternatif ».
Lui défend un retour de la gauche plurielle moins le social-libéralisme, avec des écologistes et des socialistes en désaccord avec les orientations du pouvoir actuel. À la fête de L’Humanité, le week-end prochain, il fera bon accueil à Cécile Duflot et Emmanuelle Cosse, comme à Christian Paul et aux « principaux frondeurs ». Et Laurent ne cache pas sa volonté de mettre en scène les convergences. « C’est un moment pour concrétiser des actions, des discussions sur l’alternative gouvernementale, dit-il. Le Front de gauche a un rôle de premier plan à jouer. À nous d’être audacieux et de ne pas attendre que se déroule le scénario dramatique déjà annoncé par les sondages. »
Pour la direction communiste, l’union de la gauche reste la voie la plus réaliste de sortie de l’impasse, loin des espoirs de « révolution citoyenne » de Jean-Luc Mélenchon. « Des réalités commencent à s’imposer, dit Pierre Laurent. Beaucoup pensaient il y a peu que le PS ne bougerait jamais ou que les écologistes ne sortiraient jamais du gouvernement. Et les lignes vont continuer de bouger dans le mouvement social. » Le sénateur PCF assure ne pas vouloir « continuer un tête-à-tête » avec le parti de gauche (PG), mais entend « convaincre qu’il y a un chemin praticable à emprunter ».
Mais les proches de Mélenchon semblent plus que sceptiques sur la viabilité de ce chemin. « On note les réflexions chez certains socialistes, mais elles paraissent bien faibles face aux chantages à la dissolution », tempère ainsi l’ancienne co-présidente du PG, Martine Billard. « Accompagner des actes, oui. Applaudir des paroles, non », renchérit Alexis Corbière, secrétaire national du PG. Lui-même ancien socialiste, il s’agace des atermoiements et des tergiversations, et redoute une « perte de temps » supplémentaire. « Je ne doute pas de la sincérité du tourment des frondeurs socialistes, que je connais bien pour certains, dit-il, mais si ça se finit par des abstentions, à quoi bon… Les faits trancheront, mais on ne peut pas bâtir une stratégie sur l’évolution au PS. »
Par: Front de Gauche.